Tout le monde devrait redouter une victoire de Poutine…

Tout le monde devrait redouter une victoire de Poutine, mais tout le monde devrait ne pas moins redouter une défaite de Poutine. Rappelons-nous cette remarque que faisait Cicéron à propos de la destruction de Carthage : Rome, dit-il, n'avait plus d'ennemi qui la maintienne en alerte. Elle a sombré ainsi dans les voluptés de la décadence. C'est ce qui a fait d'elle ensuite une proie facile pour les hordes barbares, au grand dam de tous les peuples qui jouissaient malgré tout d'une certaine paix sous son aile... Augustin a repris à son compte cette remarque dans sa Cité de Dieu, tandis que le sac de Rome avait déjà eu lieu et que les Vandales étaient déjà en chemin vers Carthage.

Il ne s'agirait d'ailleurs pas seulement pour l'Occident de se maintenir en alerte. Il s'agirait aussi de considérer l'objection tenace qu'adresse un certain Orient à ses visées hégémoniques, et de se confronter à ce qu'il y a de légitime dans cette objection.

Les peuples ont besoin de vivre en accord avec leur profond héritage, et ne pas se contenter d'être des partenaires sur l'échiquier d'un monde réduit à ses échanges économiques. L'idée n'a rien de rebutant, au contraire. Mais il est des façons de la défendre qui, au lieu de la servir, renforcent contre elle l'avantage de l'adversaire.

C'était l'erreur d'Hitler : voler au secours des Sudètes - germanophones - qui seraient victimes de la domination tchécoslovaque, annexer l'Autriche pour réaliser le rêve d'une grande nation germanique et, dans la foulée, imposer sa loi à ceux à qui ce projet ne plait pas.

Résultat : il s'est enlisé dans la guerre, a suscité contre lui une multiplicité de fronts, a perdu la guerre en laissant derrière lui ruine et souffrance et... a conféré finalement à cet Occident libéral qu'il pensait terrasser les armes d'une plus grande cohésion face à ses ennemis, d'une plus grande confiance en soi et a renforcé en lui cette propension à imposer son ordre libéral dans le monde.

Dans un contexte assez différent et avec un style tout autre, Poutine semble pourtant emprunter la voie de son triste prédécesseur. L'analogie ne s'arrête pas là : il est en train de faire taire le monde des médias et les intellectuels, de liquider les voix qui expriment une opposition.

Comme Hitler, son erreur est de vouloir imposer par la force un changement dans le monde qui aurait besoin de la confrontation des idées et de la négociation. L'aboutissement logique de cette dérive est le règne de la terreur, qui ne peut que jeter l'opprobre sur ce qu'on croit défendre.

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