Une sioniste dans le rôle d’une antisioniste

Curieux comme l’actualité parisienne nous rattrape à la faveur de l’actualité palestinienne. Ainsi donc Charlotte Gainsbourg, fille du fameux Serge et de la non moins connue Jane Birkin, n’est autre que la compagne de ce Yvan Attal qui a fait récemment parler de lui en partageant sa belle trouvaille au sujet du peuple de Gaza : ce dernier, déclarait-il, veut sa propre Shoah, à la fois par jalousie du peuple juif et pour pouvoir monnayer plus tard son statut de victime dans le but de s’octroyer des terres… Fin psychologue, le sieur. Mais surtout assez pitoyable. Il eût été plus juste de rappeler au moins qu’avant de méditer pareils desseins, le peuple de Gaza a d’abord celui de survivre… Mais on voit bien le sens de l’argument : si ce sont les gazaouis qui, de leur propre chef, attirent sur eux le martyre, l’État d’Israël qui bombarde et qui canarde, lui, ne fait tout cela qu’à contre-cœur, le pauvre, …

Il fallait donc que Charlotte Gainsbourg unisse son destin à un pareil personnage, elle cette actrice si sensible qui semblait exprimer à l’égard du monde entier autant d’empathie qu’elle en recueillait de lui en raison de sa fragilité. Il fallait aussi qu’elle ne se contentât pas de partager avec lui sa vie, mais qu’elle se laissât embarquer encore dans ses errements au sujet de la question de la reconnaissance de l’État de Palestine : c’est-à-dire dans cette politique consistant à multiplier les conditions face à cette reconnaissance, tout en faisant implicitement passer la résistance à l’oppression pour un terrorisme qu’il s’agirait d’abord d’éradiquer… Ce qui revient à dire : Bravo Netanyahou, mais il faut continuer le boulot. Et toi, Macron, ne t’en mêle pas et ne cherche pas à l’entraver par des initiatives inopportunes.

Bref, je ne pensais pas que la Charlotte en question en viendrait à prendre position publiquement en épousant le discours d’un gouvernement israélien que de moins en moins de gens hésitent encore à qualifier de « génocidaire ».

Mais l’actualité parisienne, c’est aussi que la même Charlotte Gainsbourg, si engagée auprès de son compagnon dans le soutien à Israël en dépit des massacres, de la famine et de l’insulte au droit international, incarne le personnage de Gisèle Halimi dans un film biographique en préparation. Personnellement, je ne suis pas contre, dès lors que ce rôle lui permettrait de découvrir une autre facette de la judéité dans son rapport à l’autre, au droit à l’existence de l’autre. Car Gisèle Halimi, dont on s’enorgueillit à juste titre des origines tunisiennes, est en soi une école d’engagement au service d’autrui et au péril de son propre « confort communautaire ». Mais si ce film, avec ce casting, devait au contraire tirer la grande militante sur la pente que Charlotte Gainsbourg s’est laissé prendre dans sa vie avec son compagnon, si elle devait infliger au personnage qu’elle incarne la même transformation qu’elle a accepté de subir dans son parcours personnel, alors on ne pourrait que se joindre au front de la protestation qui se fait entendre en ce moment.

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