Sur la politique monétaire en Tunisie…

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Le relèvement du niveau des débats au point de ''théoriser l'intervention de la BCT'' ne peut, en soi, qu'être réjouissant. En fait, en discutant avec des amis étrangers de nationalités différentes, ils marquent leur étonnement à l'égard des avis exprimés en public sur la politique monétaire en Tunisie, employant des termes assez techniques et savants qui ne sont utilisés chez-eux que dans des cadres restreints...

Cependant, hier j'ai vu deux publications récentes (in Le Temps, et in Kapitalis. (1)) donnant l'étendue théorique à la politique monétaire actuelle en revenant à M. Friedman, et même à I. Fischer, dont l'une qualifie les membres du CA de la BCT de ''Monétaristes'' et leur débat interminable contre les Keynésiens !!!

A priori, il y a peut-être un peu de ça, puisque la BCT cible du doigt l’excès de la demande finale comme principale source d’inflation qu'il faudrait compromettre, mais prône en même temps l’efficience productive de moyen terme qui déborderait le contexte Friedmanien publiquement cité.

Autant que les amis étrangers sont éblouis du '' haut niveau de l'intellectualisme tunisien'', autant que la prudence m'a interpellé pour la banalisation de la Théorie Economique, et ce pour les raisons suivantes:

- D'abord, ces théories sont très délicates et compliquées pour en faire usage comme point de départ. Elles sont multidimensionnelles et font appel à la politique monétaire, budgétaire, aux cycles et au marché de l'emploi en même temps.

Ce n'est pas une question simplement de charlatanisme. Elles requièrent une observation prouvée empiriquement, pour qu'elles soient référencées quand leurs conditions sont réunies. Le contraire est faux. (D'ailleurs, le Monétarisme particulièrement est fondamentalement empirique).

- Prendre ses hypothèses de départ, construisant son référentiel théorique, pour des vérités universelles, revient à se priver de voir la réalité comme telle, et risquer de défendre l'indéfendable.

- La quasi-totalité de ces théories macroéconomiques s'accordent sur les effets de long terme de la politique monétaire. Tous les débats et controverses, à ma modeste connaissance, ont porté sur le court terme. De là à en prendre partie pour ou contre l'augmentation du taux directeur de 100 pdb à partir d'un préalable schéma théorique tronqué, me semble ostentatoire et porteur de biais théorique…

- Aussi, faudrait-il rappeler que la théorie macroéconomique dans sa dimension monétaire a suffisamment évolué pour non seulement se détacher de cette partition très ancienne, mais aussi pour s'achever et faire même l'appel à ''repenser la Macro-économie''.

- A ma connaissance du milieu académique tunisien, datant de plus d'un quart de siècle, et avec tout le respect que je dois à mes collègues et à nos aînés qui nous ont appris le respect de la science et la prudence quand les théories économiques sont évoquées, je ne me rappelle point d'un débat doctrinal généralisé au sein du mainstream entre tunisiens catégorisés en monétaristes, keynésiens, postkeynésiens, nouveaux-keynésiens, et autres, autour de la politique monétaire en Tunisie !

Je ne me rappelle pas non plus qu'un courant de pensée s'est créé remettant en cause ou défendant la structure de la fonction d'utilité, ou même les fondements de la préférence pour la liquidité ou pour le présent, ou du taux d’intérêt spécifique, ou même les mécanismes de formation des anticipations, si ce n'était des débats individuels entre marxisants et libéraux (ce qui ne nous concerne pas ici).

- En dehors de tout cela, cette semaine le Prix Nobel P. Krugman a été farouchement critiqué par un Économiste de Stony Brook University sur ces propos portant politique monétaire dans le cadre de la Théorie Monétaire Moderne, considérés Faux. (2) (Sans commentaire).

- Certes, de par la formation initiale de quelques-uns, il y a un penchant vers un libéralisme d'une part et des intuitions privilégiant l’interventionnisme d'autre part. De là à classer les individus parmi les fondateurs de la pensée économique, sans qu’ils ne le désirent, je crois que ce serait une aberration fortuite, qui n'améliore pas l'efficacité de la politique monétaire, et ne permet pas de réussir plusieurs arbitrages actuels…


Notes

(1)kapitalis.com.tunisie/2019.03/01.fondement-theorique-et-impact-economique-de-la-decision-de-la-bct-

(2) https://www.bloomberg.com/opinion/authors/ASym14c8hEQ/stephanie-kelton?fbclid=IwAR03SA7UnK4chitLjGBwYTdps1tARLQdQG3MdiA4OVzJiQTCyQFTnjf55AQ

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