Le silence des maîtres et la parole blessante des planches tunisiennes.

Chronologiquement, l’Art précède la Philosophie, laquelle, à son tour, précède la Science. Pourtant, à mesure que la Science progresse, elle impose à la Philosophie un surcroît d’exigence en rigueur, méthode, et engagement. Et cette dernière, en retour, projette son ombre critique sur l’Art. Aucun de ces champs ne saurait exister en dehors de la société, ni se soustraire aux conditions historiques et culturelles qui les façonnent.

C’est ce que nous avons appris à travers les cours d’histoire, de méthodologies de la connaissance, et de l’économie politique. Dans cette dynamique, la science ne peut avancer que si elle préserve sa vocation fondamentale de pénétrer l’essence des phénomènes, mais aussi témoigner de son époque avec lucidité. Et dans ce même esprit, l’Homme de l’Art, qu’il vienne ou non de la Science, se doit de rompre avec toute forme d’aliénation, ou du moins d’en prendre conscience, afin de contribuer à la transformation du monde. Car l’Art véritable est l’expression symbolique d’une réalité complexe, un effort pour élever l’âme du sujet social vers des vérités que la nature, aussi sublime soit-elle, ne saurait formuler sans l’intermédiaire de l’artiste.

C’est pourquoi certaines dérives dans le champ artistique interrogent.

Hormis l’hypothèse d’une colère soudaine dirigée par un comédien contre celui qui fut jadis son élève, motivée par des raisons personnelles ou circonstancielles, trois interprétations me semblent néanmoins plausibles. Ou bien ce comédien n’a jamais véritablement compris la mission de transmission, cette mission fondamentale de l’enseignement artistique qui consiste à outiller l’élève pour qu’il le dépasse un jour, avec honneur.

Ou bien l’école dont il se réclame a failli dans son projet d’émancipation, révélant l’échec plus vaste d’un système éducatif culturellement appauvri. Ou bien encore, et c’est là peut-être le plus douloureux, l’artiste est resté prisonnier d’une aliénation politique ou idéologique, incapable de dépasser le stade d’une simple contemplation.

En se tenant en retrait des tensions réelles qui traversent son époque, il finit par trahir la vocation première de l’art à savoir celle de déranger, d’interpréter, et de sublimer la réalité pour éveiller les consciences. Ainsi enfermé dans une grille de lecture appauvrie par ses propres frustrations, il devient un acteur passif de son temps, plutôt qu’un révélateur de ses contradictions.

Sans avoir l’intention de généraliser, que reste-t-il alors du théâtre, si ce n’est une parole amputée de sa portée transformatrice ? Que devient le métier d’acteur, si l’on oublie qu’il ne s’agit pas seulement d’occuper la scène, mais bien de la faire vibrer au rythme du monde ?

Poster commentaire - أضف تعليقا

أي تعليق مسيء خارجا عن حدود الأخلاق ولا علاقة له بالمقال سيتم حذفه
Tout commentaire injurieux et sans rapport avec l'article sera supprimé.

Commentaires - تعليقات
Pas de commentaires - لا توجد تعليقات