Une nouvelle économie politique: “On ne peut qu’alléger les maux du nouvel enfantement”

Certains de mes amis m’ont interrogé sur les prévisions concernant l’émergence d’une nouvelle économie politique (NEP), dont certaines prémisses sont déjà observées depuis au moins deux décennies, et qui ne tarderont pas à se matérialiser. Il est clair que cette NEP n’est pas une nouvelle théorie de la valeur, ni du marché non plus, ni de la production. Il s’agira plutôt d’une nouvelle acception de la réalité concrète dans laquelle le statut épistémologique de l’État, de la Société et donc de l’Individu est différent de celui qui a été intelligiblement envisagé depuis l’émergence de la formation économique et sociale capitaliste au début du XVIe siècle, dans le sillage de l'ère de la modernité.

Ainsi, la NEP “décolonisée”, pour citer Feu Pr. Khaled Manoubi dans son ouvrage de 2020, va de pair avec le développement de l’histoire: la fin du cycle de certaines forces économiques et le début du cycle ascendant d’autres.

Avec ou sans transition, cette NEP donnerait plus d’autonomie et donc de marge de décision à de nombreuses régions du monde jusqu’alors peuplées de “non-sujets”. Il semble en effet que les changements sociaux et politiques actuels dans de nombreuses régions du monde (arabe, Europe de l'Est, Asie, Afrique et Amérique latine), qui renforcent leur capacité à négocier leur propre destin, rendent les relations horizontales plutôt que verticales avec les centres classiques du pouvoir.

À cet égard, le Printemps arabe, le Covid, la guerre en Ukraine, la montée en puissance de la Chine et de ses alliés, etc., ne sont que des catalyseurs susceptibles d’accélérer le développement de l’histoire, mais, même sans eux, rien ne pourra l’arrêter ou l’inverser. En fait, succube société dans l’histoire qui s’est retournée sur soi.

Quant à l'Economique de cette dynamique de l'histoire, on peut se limiter au moins à :

(1) La réduction des disparités en termes de conditions matérielles de reproduction sociale entre les centres capitalistes standards et certaines régions dites périphériques,

(2) le transfert international de connaissances considérées comme un capital humain favorisant la durabilité de la reproduction sociale des individus à travers le monde et renforçant leur autonomie,

(3) le caractère horizontal des relations observé au niveau international s'observe également au niveau local et entre les individus. Cela donnerait aux individus la possibilité de se séparer de l’État, puisque le besoin diminue, mais aussi aux pays de la périphérie, de se détacher des centres de pouvoir traditionnels.

Notons enfin que le mot “Nouvelle Économie Politique” n'est pas une innovation en soi, comme Lénine, puis Trotski, et toute l'école de la CEPAL (Commission de l'Economie Politique de l'Amérique Latine, années 1950), et même nombre de travaux récents qui le prétendent. Cependant, ces approches étaient plus entachées de politique et d’idéologie révolutionnaires que de témoignage de la réalité actuelle.

Finalement, peut-on dire quand cela arrivera ? Certes, le chemin n’est pas si court, mais la réponse serait plus simple de dire: “On ne peut qu’alléger les maux du nouvel enfantement” (Dixit, K. Marx), c’est-à-dire qu’on ne peut pas prévoir l’histoire.

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