Quid de la politique monétaire de la BCT…

Plusieurs amis m'ont demandé (en privé) des explications sur le commentaire que j'ai fait hier concernant la déclaration d'un professeur d'université sur Express-FM, la seule radio locale à vocation principalement économique. Je l'ai supprimé, car je suis convaincu qu'il n'y a point de débat dans ce Bled et que toute initiative intellectuelle est prise de travers, presque systématiquement mal interprétée, subjectivement, comme si les propos de l'auteur, prononcés publiquement, étaient définitifs et indiscutables; des propos en sciences sociales! Mais au-delà de ce constat, voyons l'essentiel :

Premièrement, l'analyse de la politique économique, et notamment monétaire, dans le monde réel ne doit pas être en dehors de l'économie politique (ou, pour être précis, mais long : '' l'Approche Politico-économique de la Politique Économique''), car cette dernière se fonde sur l'observation du réel et ses enjeux, qui, souvent cachés, influencent la décision concrète, ô combien complexe. Par conséquent, s'appuyer sur le ''bon sens'', voire ''simplifier les enseignements théoriques'', serait réducteur, car tout ce qui est simple est faux et tout ce qui est compliqué est inutilisable (Valéry) . Mais qui serait capable d'identifier le niveau minimal de complexité ? Personne.

Deuxièmement, affirmer que le seuil (dit arbitrairement) ''critique d'inflation'' est de 5 %, en dessous duquel la BCT révisera son taux directeur à la baisse, est tout simplement faux. Et pour cause :

(1) Cela supposerait que l'objectif d'inflation de la BCT soit annoncé ; ce qui n'a jamais été le cas, car cela suppose le passage officiel (et non informel) au Ciblage de l’inflation ou du taux de change’’ ; ce qui supposerait une réforme structurelle (…) ;

(2) cela supposerait que le seul driver de la politique monétaire soit l’inflation ; autrement dit, '' ce qui est annoncé soit parfaitement poursuivi'', ce qui n'est pas évident. En fait, sans s'étaler sur les facteurs non-visibles tels que les arrangements informels sur fonds de rente immédiate ou anticipée, entre groupes de pression (prévue par l'Économie Politique...), l'historique du taux directeur des dix dernières années ne montre pas cette corrélation univoque, à moins de prendre en compte une autre double corrélation, celle avec les réserves de change et les échéances de remboursement de la dette. Et si tel était le cas, c'est-à-dire si l'on était en mesure de croire fermement au principe ''Objectif annoncé = objectif poursuivi'', cela donnerait ostentatoirement de la crédibilité à la politique monétaire de la BCT, qui n'est jusqu'à présent pas validée factuellement. Cela va aussi sans rappeler que la politique monétaire de la BCT est ''discrétionnaire'' et non ''soumise à une règle'' [Kydland et Prescott, et d'autres comme Evans, etc.].

(3) Affirmer que les ‘’Centres de recherche’’ ne nous ont pas indiqué quel sera le profil d'inflation pour les mois à venir est une affirmation dénuée de tout contenu scientifique, car -pour ceux qui l'ignorent- il s'agit d'un exercice de prévision très simple, réalisable par un économiste très moyen.

(4) Enfin, et c'est peut-être le plus important : discuter des ''seuils'' en analyse économique est un niveau d'analyse très délicat, car cela suppose que l'analyste :

(1) Pense à des phénomènes non monotones, non linéaires et aléatoires, car fluctuants, et donc, pour simplifier, cycliques ;

(2) a déjà établi le lien avec les déterminants de l'inflation pour conclure que ce seuil de 5% d'inflation synthétise la situation macroéconomique, ce qui ne semble pas avoir été fait ! Cependant, les grands économistes ne l'ont pas fait. Je pense notamment à Krugman et à son seuil d'endettement, ainsi qu'à Blanchard, Reinhart… Tous ces grands pontes ont plus souvent suscité des controverses qu'ils n'ont apporté de solutions.

Enfin, prendre à la légère des questions très compliquées, et trancher en public de manière peu précise, cela pourrait induire en erreur non seulement le décideur et les acteurs économiques ayant confiance en ces experts, en poursuivant leur comportement anticipatoire sur le dinar, mais surtout nos étudiants.

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