Sommes-nous Un Etat Souverain et Indépendant ?

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Après avoir entendu quelques bribes de l’intervention, assez fantasque comme d’habitude, du Président de la République où il devait être question de vision entrepreneuriale, des perspectives de l’économie tunisienne dans un contexte moribond et peu favorable à l’investissement et à la création de nouveaux emplois, bref, des thèmes rebutants, répugnants, qui sont d’un ennui mortel et qui ne suscitent aucun enthousiasme auprès de Monsieur Essebsi qui est à l’économie ce que votre serviteur est aux mathématiques, je disais donc, après avoir religieusement écouté sa profession de foi accompagnée des effets de manche coutumiers qu’il a hérités de Bourguiba, je n’ai pas retenu grand-chose, à mon grand dam, néanmoins, il y a une phrase ou deux, qui m’ont sidéré, oui, je le confesse, j’en fus abasourdi, choqué, ébranlé bien que je sois une personne très avertie et très avisée !

Complètement sonné, groggy, je me suis rappelé le Traité du Bardo, le Bey, les courtisans, la banqueroute, les trahisons, le proconsul, ses neveux, ses nièces, les colons…

Aurais-je eu la berlue, par hasard ? Je revois l’extrait, attentif à toutes les syllabes, à la façon dont les mots sont proférés, certes, le brouhaha est tel que je peine à comprendre ce qu’il dit, cependant, mes doutes vont se dissiper rapidement, je n’hallucinais pas, il a osé le dire…Notre Président, bien qu’il ne soit pas féru de bananes, reçoit ses ordres d’un grand manitou étranger dont il taira, pudiquement, le nom…Et Big Brother, que je soupçonne d’être un tantinet puissant et persuasif, n’admet pas que l’on discute ses instructions, le Béji est censé les exécuter sous peine de dures représailles !!!

Alors, les grincheux de toujours, ceux qui s’accrochent comme des morpions à l’esprit et à la lettre de la Constitution, ceux qui manifestent, même si c’est timidement, leur désappointement, à chaque fois que le Président viole ladite Constitution, doivent comprendre que Monsieur le proconsul américain n’autorise aucune contestation et que le pauvre Président se soumet , bien malgré lui et à l’insu de son propre gré, docilement au diktat de l’Empire !

Terrible aveu d’impuissance, de faiblesse, de servitude, de dépendance !

De l’aveu même du Président, notre destin se décide ailleurs, en l’occurrence, à la maison blanche, où Obama entre un swing, une bombe larguée sur les méchants de Daech et une altercation avec Poutine, s’inquiète des turpitudes de Nidaa Tounès, des rivalités puériles entre deux gosses capricieux se battant comme de vilains chiffonniers pour succéder au patriarche !

Son désarroi est tel qu’il a demandé à son représentant en Tunisie d’intervenir toute affaire cessante afin de mettre fin à ces querelles qui risquent de déstabiliser la Tunisie et de compromettre la réussite du processus démocratique !

J’imagine l’ire d’Obama, sa grosse colère, son courroux quand il a appris ce que manigancent le stalinien Mohsen Marzouk et sa horde de gauchistes éradicateurs, j’imagine ses injonctions au téléphone ainsi que la frousse qui s’est emparée de notre Président au moment où le gus, d’habitude calme et placide, lui hurlait à l’oreille, la gauche pour être précis, qu’il fallait faire le ménage au sein de Nidaa Tounès et en exclure les Judas !

Même si sa fierté en prit un sacré coup, qu’elle s’effilocha au pied de Big Brother et que l’orgueil bouguibien dont il se parait si vaniteusement fut outrageusement abîmé par l’arrogance impériale, le Président sut affronter avec dignité l’opprobre et confia à son peuple que la Constitution, quoiqu’elle fût écrite avec le sang des martyrs, bien qu’elle fût la fille de la révolution, qu’elle délimitât son pouvoir et ses attributions, qu’elle le confinât dans un rôle secondaire et insignifiant de « portion congrue » indigne de sa majestueuse prestance, qu’elle soulevât amour et passion, envolées lyriques et louanges dithyrambiques, cette Constitution mythique que nous envient tous les démocrates du monde ne valait ni le pet d’un hibou borgne ni l’éternuement d’un Obama irascible !

Tout le monde se rappela à ce moment là la phrase prophétique d’un ancien député de l’ANC où son passage, quoique éphémère et sans éclat, s’illustra uniquement par cette terrible sentence qu’il proféra pourtant sans grande conviction : « Cette République, est une République bananière ! »

Nous étions sceptiques quant à la lucidité du puceau, mais il faut nous rendre à l’évidence, aussi funeste soit-elle : Nous ne sommes ni un Etat souverain ni un Etat indépendant…encore heureux que nous ne soyons pas les cerfs des qataris, l’honneur est sauf ! Quel soulagement, nous l’avons échappé belle, nous aurions été la risée de la galaxie et alentours ! Au moins, et croyez-moi, c’est une gratification, nous savons choisir nos maîtres !

Que les aigris ne s’en offensent point, nous sommes quand même mieux lotis que nos voisins, nous avons encore une République, certes diminuée, amoindrie, paraplégique mais c’est une République !


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