Chroniques apocryphes du bâtisseur de la 'Nouvelle République'.(10)

J-17.

Aujourd'hui je voudrais revenir sur le gouvernement que j'ai constitué en octobre dernier. Mine de rien, il va survivre à deux fêtes de l'Aïd, ce qui ne s'est pas produit avec les gouvernements précédents depuis mon élection.

A sa tête, j'ai placé une femme, fait sans précédent dans le monde arabe, pour dissimuler son illégitimité par une mesure qui fasse sensation et frapper l'imagination. De ce point de vue, je n'ai pas raté mon objectif, surtout sur le plan national. Mais beaucoup moins à l'international....

Madame Bouden, en l'occurrence possède quelques qualités indéniables. La 1ere, et c'est d'ailleurs, tout ce que je lui demande, est la loyauté. La seconde, c'est de croire à tout ce que je lui dis.

Vous vous souvenez, sans doute, de son 'Machallah', à peine audible, lorsque je lui ai affirmé publiquement dans mon bureau, la présence de 1, 8 millions de mes partisans dans les rues de Tunis, à l'automne dernier. Et bien, c'est la même chose en off…

Le jour où j'ai travaillé d'arrache-pied pour finaliser ma constitution, je lui ai raconté que j'ai avalé pas moins de 20 capucins et express. Elle m'a rétorqué que Balzac, ingurgitait, chaque jour, autant de cafés lorsqu'il s'est s'attelé à la rédaction de son chef d'œuvre 'la comédie humaine'...

Tiens, le titre d'un des romans de cette série, 'Illusions perdues' pourrait être celui du préambule du projet de constitution que je m'apprête à soumettre au référendum.

La ministre de la Justice est aussi remarquable dans son genre et son allure discrète mais efficace m'est d'un grand apport. J'apprécie chez elle, sa façon de neutraliser n'importe quel juge, d'une phrase assassine sans même élever la voix.

Je me félicite aussi du comportement du ministre de l’Intérieur. Il devrait, toutefois, faire attention à son tempérament, un brin parano, que je m'efforce de brider. L'année dernière, il m'avait alerté sur une prétendue action terroriste, qu'il a réussi à débusquer. On a même déboulé ensemble, toutes sirènes hurlantes et caméras pied au plancher, flanqués de la moitié de la BAT. Pour se retrouver tout penauds, dans un domicile mitoyen à l'ambassade de France, face à deux SDF, occupés à picoler du Koudia.

Rien de bien méchant mais on s'est couvert de ridicule...

Le ministre des Affaires étrangères, est également un pilier de ce gouvernement dont aucune tête ne dépasse. L'autre jour, il s'est déplacé à l'ambassade de Grande Bretagne, à l'occasion du jubilé de la Reine pour rappeler, en dépit de tout ce que j'ai pu faire depuis le 25 juillet dernier, que la Tunisie était dans un 'processus démocratique irréversible'.

Une langue de bois aussi épaisse qu'un traité de philosophie... En la matière, je crois que je suis tombé, à ma grande satisfaction, sur un orfèvre…

J-16.

Hier en vous formulant mes vœux en cette fête de l'aïd kebir, j'ai profité de l'occasion pour vous annoncer que mon projet de constitution allait être modifié et par conséquent republié.

Il m'a suffi d'exploiter encore une fois toute la palette des pleins pouvoirs que je me suis arrogé par le décret 117. Tant qu'à faire, pourquoi me gêner ?...

Pendant ce temps, le microcosme s'est vite emballé croyant à un aggiornamento complet de ma part.

J'ai certes pu récupérer la sauce en ajoutant dans l'article relatif aux libertés, un renvoi au 'régime démocratique' concept que j'avais complètement oublié et j'ai remis, au goût du jour, la possibilité pour une femme de se porter candidate à la présidentielle. C'est la moindre des choses lorsqu'on vise les suffrages de la gent féminine.

Pour tout le reste, ce n'est que du formel, un toilettage syntaxique et ce projet, en avait bien besoin.

En effet, le texte que j'ai présenté était perclus, tout à la fois, de fautes d'orthographe, grammaire et conjugaison. En plus d'un nombre important de coquilles et pour couronner le tout, comme un cheveu dans la soupe, une erreur de numérotation. Et qui plus est, dans sa version originelle, un comble…

Quand on sait combien je chéris cette langue arabe, que je gratte quelque fois de ma belle plume sur des parchemins en papyrus… Bref, de quoi aussi faire perdre leur latin à mes nombreux et pas moins fanatiques partisans.

En tout état de de cause, ça ne faisait pas sérieux de rendre un texte bâclé à ce point, que je voulais global en attendant d'être totalitaire… Les plus acerbes à mon endroit, ont vu dans ces fautes qui sont passées à travers les mailles de ma propre correction, mes limites pédagogiques, devinant pourquoi j'ai eu une banale carrière de professeur universitaire.

Je leur dis tout simplement que, habitué à rendre publiques, mes décisions autour de minuit et poussé par la solennité de cette circonstance spéciale, j'ai cru bien faire en avançant à 21 H sa publication il y a une dizaine de jours.

Sauf que, en essayant de rattraper le coup, je crains d'avoir étalé quelques signes de ridiculisation…

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