Accord militaire Tunisie/Algérie : le pacte de la peur, la capitulation de la souveraineté

Qu’on le confirme ou qu’on le nie, qu’on l’assume ou qu’on le camoufle, l’accord militaire tuniso-algérien existe politiquement. Il existe par les gestes, par les visites, par les communiqués algériens, par les commissions mixtes, par la mise en scène assumée à Alger — et par le silence coupable de Tunis. Les régimes parlent parfois plus fort par ce qu’ils font que par ce qu’ils écrivent. Et ici, tout parle.

Depuis des semaines, une copie non officielle d’un accord militaire signé le 7 octobre 2025 circule. Le pouvoir tunisien n’a opposé ni démenti clair, ni publication officielle, ni débat national. À la place : l’esquive, le brouillard, le mépris. C’est déjà un aveu.

À quelle menace cet accord répond-il ? À aucune que l’on puisse sérieusement identifier pour la Tunisie.

Le terrorisme sahélien ? Il frappe durement l’Ouest africain et concerne directement l’Algérie. Mais la Tunisie ? Pour y parvenir, des groupes armés devraient traverser… l’Algérie elle-même. Autrement dit, l’argument sécuritaire se mord la queue.

La Libye ? Cela fait des années que ce prétexte est brandi comme un épouvantail. Or, depuis la mise en place des dispositifs de sécurisation à partir de 2016 — durant la décennie de transition que le régime s’acharne à qualifier de “noire” — aucun fait sérieux, aucune alerte documentée ne vient accréditer l’existence d’une menace imminente justifiant un verrouillage militaire exceptionnel.

La réalité est plus nuancée : aucune menace extérieure clairement identifiée ne s’impose aujourd’hui pour la Tunisie. Elle est invoquée parce qu’elle est commode, pas parce qu’elle est réelle.

On convoque alors le grand théâtre régional : tensions algéro-marocaines, normalisation entre le Maroc et Israël, coopération militaire Rabat–Tel-Aviv, soutien américain à Israël et au Maroc, y compris sous Donald Trump.

Mais là encore, aucun impact direct sur la sécurité tunisienne. Pendant des décennies, la Tunisie a joué la carte de l’équilibre et de la modération. Aujourd’hui, elle renonce à ce rôle pour s’aligner, sans rien gagner.

L’anti-normalisation avec l’état génocidaire Israël brandie par Kaïs Saied n’est qu’un leurre rhétorique. Elle ne dissuade personne, n’influence aucun rapport de force, ne protège aucun citoyen. Elle sert à une seule chose : habiller une dérive autoritaire de slogans moraux, pendant que les solidarités populaires réelles sont surveillées, contenues, réprimées.

Il faut cesser l’hypocrisie. La seule menace que ce pouvoir identifie clairement est interne.

Opposition politique, juges indépendants, journalistes, syndicats, associations, universitaires : voilà l’ennemi réel de la prétendue “guerre de libération” proclamée par le régime.

Dans cette logique, un accord militaire secret, compact, asymétrique n’est pas une aberration : c’est un outil de survie du pouvoir. Il ne vise pas à défendre la Tunisie, mais à sécuriser un régime illégitime, acculé, contesté, incapable de gouverner autrement que par la peur, le mensonge et le complotisme.

Ce qui se dessine est un marché cynique entre deux pouvoirs sécuritaires :

• Pour Tunis : une assurance-vie politique, un parapluie sécuritaire et de renseignement, soutenus par des aides financières et gazières, destinés à étouffer toute dynamique de changement démocratique.

• Pour Alger : une frontière orientale verrouillée, un voisin aligné et un discours de guerre permanent entretenu — Maroc, séparatistes, complots “franco-israélo-américains” — qui nourrit sa propre légitimité autoritaire.

Ce n’est pas une alliance entre peuples. C’est une solidarité de régimes.

Le débat n’est plus cantonné aux réseaux sociaux. Le quotidien français Le Figaro a accordé un crédit réel aux informations circulant, en recoupant fuites, séquences officielles et silences tunisiens. L’opacité, l’asymétrie et les implications souveraines de cet accord ne sont plus des “rumeurs militantes” : elles sont désormais un sujet international.

Il n’y a pas de menace extérieure majeure. Il n’y a pas de justification stratégique crédible. Il n’y a qu’un pouvoir qui confond l’État avec lui-même et qui est prêt à brader la souveraineté nationale pour prolonger son règne.

Les accords secrets ne sont jamais signés pour la sécurité des peuples, mais pour la survie des régimes — quitte à sacrifier les pays qu’ils prétendent gouverner.

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