Confinement et vaccination …

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3 Août 1903, naissance d’un messie en Tunisie. Un rarissime moment épique car il sait déjà que cet instant sera bénéfique. Après un sourire, le nouveau-né vizir insufflera un avenir tout en devenir. À sa première respiration, une Nation, jusque-là en perdition, verra le jour et la nuit se succéder avec passion et les saisons s’alterner avec raison. Le flux et le reflux des marées feront s’écraser les vagues et les algues sur les madragues.

Le soleil codera notre horloge biologique en synchronisant notre éveil et notre réveil. Le sommeil, inhibiteur du stress et stimulateur de notre immunité, sera une merveille. Les planètes tourneront autour de leurs satellites, les équinoxes égaliseront les minutes, les couches terrestres seront identiques et le monde de la cellule et de l’atome sera magique. Dieu et Bourguiba, sur un même piédestal, quel régal ! …

Ainsi parlait Zarathustra et parlent encore les flagorneurs de la Dictature. Loin d’installer une pédagogie de circonstance, les revoilà, vantant les mérites de leur idole d’avoir été à l’initiative de la vaccination par le BCG et de sa généralisation à toute la Tunisie. D’ailleurs, Messires Calmette et Guérin n’ont qu’à bien se tenir et devront laisser en modèle déposé, le premier sigle du vaccin qu’ils avaient inventé. Pour ma part, je leur accorde volontiers que Bourguiba ou Bacille, c’est du pareil au même, en termes de nuisance sur la santé physique et mentale des esprits dominés …

Tous ces délires ubuesques ne sont médiatisés qu’à la mesure des séquelles qu’elles ont générées. Il est immoral qu’à l’heure actuelle, l’on fasse muer un despote en vedette. Chaque courbette en sa faveur n’est qu’une injure supplémentaire à l’âme de ses victimes, décédées silencieusement dans les geôles de l’intolérance. Ne pas décrier une telle abomination est une lâcheté et dépasser les intérêts d’une communauté endoctrinée est nécessaire à la réconciliation nationale.

À moins que n’existe encore la déferlante des injustices, inféodée aux impératifs politiciens de circonstance et à l’imposture de toutes les propagandes étatiques. Mais alors, ne me dites plus que la Tunisie est un pays démocratique, sinon pourquoi cette hypocrisie qui y règne, ainsi que la soumission à la pensée unique, éternelle et prédatrice ! …

Nous voici, avec cette histoire de vaccination, encore une fois, au cœur du défi tunisien. Le nœud gordien qui entrave notre pays et qu’il nous faut dénouer, est cette nostalgie d’un modèle qui n’avait fonctionné que dans une relation dissymétrique et folkloriste, du plus fort au plus faible.

Plutôt que d’allumer des phares pour éclairer un futur compromis, certains ne regardent que dans le rétroviseur d’un passé révolu et fauteur. Non, Bourguiba n’était pas médecin et ne fût pas l’initiateur d’un quelconque calendrier de vaccination. C’était une politique de la France coloniale, dont il faut savoir parfois reconnaître les mérites. Non, il ne fût pas non plus à l’origine de la généralisation du BCG qui avait débuté au moins dix années avant son règne.

C’était une recommandation de l’OMS et de l’UNICEF, à laquelle il donna son accord quand il fût Président, comme l’avaient fait tous les gouvernants de la planète. Il faut donc cesser de le considérer comme Goldfinger, bienfaiteur de tout ce qu’il touche et malfaiteur en rien comme l’Abbé Pierre. S’identifier à une éponge qui absorbe les mérites des autres sans aucun respect pour les droits d’auteur, c’est faire en sorte que celle-ci ne cesse de gonfler pour ses idolâtres et pour les générations futures.

Après avoir ôté à lui tout seul les Tunisiens des griffes du colonisateur, il les avait délestés de leurs poux et les avait fait vacciner contre le BCG : une triangulation à la méthode Coué, comme tant d’autres, qui insulte la Mémoire de nos anciens et qui continue à cautionner les élans égocentriques d’un Tyran avec une verticalité déconcertante …

Si je continue de taper sur les doigts d’un Dictateur et de ses idolâtres, c’est parce que dans ce pays, on ne veut plus passer à autre chose. La plus grande production de normes antinomiques, c’est quand même eux qui nous l’imposent encore. Il n’y a pas d’intelligence vraie, sans recul, ni ironie.

À bien penser, la Conscience et la Mémoire sont une totalisation du Passé et une anticipation de l’Avenir. Lorsque ces deux composantes du temps sont confisquées au profit de l’idéal totalitaire, c’est que la lutte pour la démocratisation du pays n’est pas achevée ...

Je pense parfois à la possibilité future d’un examen national de notre conscience. À mon sens, le futur historien de ses propres sensations devra coordonner son esprit à la véracité des faits et non à sa propre émotion, bercée au violon d’Ingres de la propagande totalitaire. Pour que son âme soit digne, elle devra se détacher du poids de la rumeur et ne pas faire preuve d’esclavage ou d’infantilisme face à toutes ces hagiographies préfabriquées.

Pourquoi les moindres travers des Beys furent-ils disséqués sans que jamais, ceux, pourtant évidents de Bourguiba ne l’aient jamais été, alors qu’ils étaient tous, les acteurs de notre Histoire ? N’est-ce pas une théorie de la complaisance qui en dit long sur la partialité et le complotisme de la République qui avait formaté l’intelligentsia tunisienne à tous les niveaux ?

Je sais que je professe les opinions les plus opposées au système et je ne m’en cache pas. La perpétuation de la mégalomanie éhontée de Bourguiba et la dissimulation de ses échecs en un succès forcé, sont une renaissance de son idéal totalitaire. Pour ses soutiens inconditionnels, se raccrocher au délice de la terreur d’une Dictature pour vanter des mérites surfaits ou inexistants, c’est faire preuve d’un fétichisme maladif.

Innocenter un coupable et culpabiliser des victimes innocentes est une dérive déshonorante de la Morale et surtout un pied de nez à la Convention des Droits de l’Homme dont la Tunisie fût signataire dès le 12 Novembre 1956 …

Pour conclure sur une note d’optimisme en ces temps de confinement forcé, il faut garder espoir en l’invention rapide d’un vaccin dont on n’attribuera plus l’utilisation à Bourguiba parce que l’alibi serait plus que grotesque.

Un vaccin qui annihilerait le Co-VID en produisant les Anticorps de l’immunité, ce n’est plus une utopie. Ce qui l’est par contre, ce serait la découverte d’un vaccin contre certaines têtes VIDes pour éradiquer la divinisation d’une personne …

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