Le visage d’une résistance sans fard

Il arrive qu’une image dépasse toutes les autres, non par l’éclat d’un sourire travaillé, ni par l’élégance d’un vêtement choisi, d’une coiffure dernier cri ou d’un makeup avant-gardiste, mais par la vérité qu’elle impose.

Cette photographie de Sonia Dahmani, les cheveux blanchis par l’épreuve, est sans doute la plus belle de toutes celles qui existent d’elle. Belle non pas au sens convenu des magazines ou des portraits officiels, mais belle parce qu’elle montre une femme dans son visage véritable, dépouillé de tout artifice, marqué par la persévérance et la dignité. Cette beauté-là n’a rien à voir avec le maquillage ou la mise en scène; elle est celle de la résistance silencieuse, de la vérité nue qui s’impose quand le corps devient le miroir d’une injustice.

Le décret 54, qui prétend protéger l’espace numérique mais qui s’est transformé en instrument de répression, a voulu réduire Sonia Dahmani au silence. Or, paradoxalement, c’est dans cette image qu’elle parle le plus fort. Ses cheveux blanchis disent mieux que n’importe quel discours, la violence d’un pouvoir qui craint la parole libre.

Dans la photo qui circule, son regard est grave et son visage est marqué. Ce n’est pas seulement le signe du temps qui passe; c’est aussi le stigmate d’une justice qui use les corps et les esprits. Cette image est un acte d’accusation silencieux contre l’injustice. Elle montre que la prison n’est pas seulement une privation de liberté, mais c’est avant tout une machine à broyer la dignité.

L’affaire Dahmani révèle aussi la fragilité de l’espace public tunisien. Quand la critique devient un crime et quand l’avocat est incarcéré pour ses opinions, c’est toute la société qui se retrouve menacée. Le décret 54 n’est pas une simple loi; il est le miroir d’un pouvoir qui redoute la parole et préfère l’étouffer plutôt que de l’affronter.

Et pourtant, au lieu de susciter une indignation unanime, la diffusion de cette photo a aussi déclenché un flot de commentaires ignobles. Certains, tapis comme d’habitude derrière le confort des réseaux sociaux, se sont réjouis de voir Sonia Dahmani marquée par l’épreuve, allant jusqu’à se complaire dans la moquerie et la schadenfreude. Ces ricanements ne sont pas seulement indécents; ils révèlent la bassesse d’une partie de l’opinion, ces racailles du verbe qui aiment, pour je ne sais quelle raison, voir les autres souffrir.

Cette cruauté triviale contraste avec la dignité silencieuse de celle qu’ils attaquent, et souligne, par la même contraste, la noblesse de son combat. Que la lumière de la justice se fraie enfin un chemin, et que Sonia retrouve au plus vite la liberté qui lui appartient de droit.

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