Bien sûr, l’ère de la fin des islamistes finira par arriver. Mais elle arrivera lorsque les conditions en seront au rendez-vous, non point seulement les affirmations incantatoires de leurs détracteurs automatiques.
Aux premières heures des printemps arabes, une fois n’est pas coutume, les deux frères ennemis de la jihadologie française furent unanimes pour proclamer… la débâcle définitive des islamistes.
D’identiques raccourcis ressurgissent depuis quelques semaines. Ils malmènent à mes yeux une réalité infiniment plus complexe dont les lignes de force sont les suivantes :
Les difficultés des islamistes viennent à titre principal du fait que ce sont eux qui sont sur le front de l’offensive de la contre-révolution arabe et, d’Egypte en Tunisie, ce sont donc eux qui en paient le prix. Lorsqu’ils ont – comme en Egypte - assumé effectivement une petite partie du pouvoir, ils ont bien évidemment commis des erreurs. Mais ces erreurs sont bien davantage dues à leur inexpérience qu’à l’ « islamicité » de leur agenda.
Les islamistes paient ensuite fort banalement le prix de leur proximité avec les forces politiques illégitimes qu’ils ont accepté de côtoyer surtout lorsque, comme au Maroc, ils n’en demeuraient pas moins écartés de toute participation réelle au pouvoir.
Comme n’importe quelles autres forces partisanes, ils sont ensuite travaillés par des clivages générationnels qui nourrissent en leur sein de banales dynamiques de renouvellement. Plus globalement enfin, leurs ressources spécifiques, cette mobilisation contre l’overdose de présence occidentale, coloniale puis impériale, sont assurément de nature réactive. Et donc de nature conjoncturelle.
Mais rien ne permet d’affirmer que ces ressources sont des aujourd’hui épuisées, la vague d’islamophobie européenne contribuant même, paradoxalement, à les remonétiser.
Bien sûr, l’ère du post-islamisme finira donc par arriver. Cela se fera lorsque les conditions en seront au rendez-vous, non point seulement les affirmations incantatoires de leurs détracteurs automatiques.