Premier débat télévisé : la revanche des medias

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Huit candidats à l’élection présidentielle crispés, intimidés, sages et obéissants comme des écoliers du primaire, évitant tout esclandre, s’efforçant de répondre aux questions dans les temps impartis, et y parvenant à peu près, on ne reconnaissait pas les foudres de guerre qui se battaient durement dans toutes leurs interventions précédentes.

Pas de déclarations fracassantes, pas d’accusations contre les autres candidats, même pas l’esquisse d’une critique du bilan de tel ou tel, on se demandait s’il s’agissait des mêmes qui, hier seulement, allaient jusqu’à pourfendre leurs adversaires : tous semblaient avoir laissé leurs armes au vestiaire, et jouaient avec application le jeu que leur imposaient deux journalistes qui ne semblaient pas méchants, qui les laissaient esquiver des questions auxquelles ils ne voulaient ou ne pouvaient pas répondre, certains, par exemple, parlaient économie ou sécurité quand la question portait sur les libertés.

Je ne dirais pas qu’on s’ennuyait, mais ce n’était pas loin : venus voir un spectacle de cirque romain, avec des gladiateurs et des lions, au lieu de voir couler le sang, les spectateurs ébahis avaient assisté à une scénette d’élèves du primaire jouant avec application un spectacle pour enfants.

Tous semblaient avoir abandonné leurs habits habituels et s’être faits beaux pour parler aux maîtres d’école : on se demandait où était passée leur arrogance, eux qui nous avaient habitués à deux choses absentes hier : le mépris qui avait caractérisé leurs rapports avec des médias acquis une fois pour toutes ; et la certitude que le pouvoir qui était « au bout du fusil » était devenu l’enjeu d’idées débattues calmement, en essayant de convaincre.

Dans cette métamorphose, les protagonistes, à une ou deux exceptions près, paraissaient avoir aussi perdu leur identité ; celle-ci, qui avait l’habitude de menacer des pires tracas ses adversaires n’y fit même pas allusion, cet autre en oublia ses habituelles références à son divin protecteur, la révolution n’y fut plus un argument, ni même une référence : on avait affaire à des gens très bien élevés, qui discutaient sereinement dans un salon où avaient été remplacés les fauteuils par des pupitres….

On est tenté de rêver à ce qui se serait passé si on avait pu faire la même chose en 2011, faire discuter de l’objet de la consultation, la constitution, au lieu d’écouter les promesses mirobolantes des uns et des autres… On est surtout amené à se demander d’où vient le changement du rapport entre le pouvoir politique, ou ses aspirants, et le quatrième pouvoir, les medias, qui, hier encore étaient traités par le premier comme des larbins à son service.

Et à espérer que l’un et l’autre de ces pouvoirs poursuivent dans cette voie, celle de l’indépendance et du respect mutuels, afin de faire avancer la démocratie et la transparence du monde politique. Non pas, comme cela semble être le cas, parce que ces pouvoirs se sentent menacés par l’intrusion de nouveaux venus sur la scène politique, mais parce qu’ils auront compris qu’à la longue, les mensonges et les demi-mesures se paient très cher.

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