La réflexion géopolitique de la Turquie sur la Méditerranée orientale et la mer Noire

Domaine géographique

La Turquie occupe une position géographique de première importance en Méditerranée orientale, agissant comme un pont entre l’Europe, l’Asie et le Moyen-Orient. Son littoral sur la Méditerranée, en particulier le long des côtes méridionales de l’Anatolie et des eaux adjacentes de Chypre, lui confère un rôle stratégique central dans les relations géopolitiques et militaires de la région. Cette position lui permet non seulement de contrôler des routes maritimes vitales pour le commerce et l’énergie, mais aussi de projeter sa puissance sur l’un des théâtres les plus sensibles du monde.

D’un point de vue militaire, la Méditerranée orientale est une zone clé pour la sécurité nationale d’Ankara. La présence de la Turquie dans le nord de Chypre par l’intermédiaire de la République turque de Chypre du Nord (reconnue uniquement par la Turquie) renforce son contrôle stratégique sur le canal de Suez, le Levant et d’importants corridors énergétiques. De plus, les différends maritimes sur la délimitation des zones économiques exclusives (ZEE), notamment avec la Grèce et Chypre, opposent la Turquie à d’autres acteurs régionaux et internationaux. Ankara conteste les revendications grecques basées sur les îles du Dodécanèse et de Kastellorizo, les considérant disproportionnées par rapport à la taille du plateau continental turc.

En réponse à ces tensions, la Turquie a adopté la doctrine de la « Patrie bleue » (Mavi Vatan), qui revendique une large souveraineté maritime et prévoit une présence navale active et permanente. L’armée turque, en particulier la marine, a considérablement renforcé ses capacités opérationnelles en Méditerranée, avec des exercices réguliers et le développement de nouvelles bases navales, dont Aksaz et la base avancée de Tripoli, en Libye, grâce à l’accord militaire signé en 2019 avec le gouvernement d’union nationale (GNA).

Dans le même temps, la Turquie s’est opposée à l’émergence d’alliances énergétiques exclusives, telles que le Forum du gaz de la Méditerranée orientale (FEM), qui comprend la Grèce, Chypre, Israël, l’Égypte et l’Italie, mais pas Ankara. Cette exclusion a incité le gouvernement turc à renforcer sa projection géopolitique, notamment par l’exploration unilatérale de l’énergie dans des eaux contestées, souvent escortée par des navires de guerre.

Redéfinir la géométrie de la puissance dans la région

La mer Noire et la Méditerranée orientale : c’est là que se concentrent les conflits et les défis cruciaux qui affecteront le destin de toute l’humanité, et c’est là que se trouvent nos nations.

Des régions s’étendant de la mer Caspienne, du Caucase et du nord de la mer Noire à la mer Égée et à la Méditerranée orientale, en passant par l’Égypte, la Libye, Chypre, la Palestine, le Liban, la Syrie, la Turquie, l’Irak, l’Iran, le détroit d’Ormuz, le Yémen et la mer d’Oman, un front commun s’est formé contre l’influence de l’Occident mondialiste, représenté par les États-Unis et Israël. Ce front n’est pas seulement une ligne géopolitique, mais une frontière morale défendant la souveraineté et la dignité humaine. Face à l’impérialisme atlantique, nous réaffirmons notre détermination à résister, à protéger l’intégrité de nos terres et à assurer la liberté et la prospérité de nos peuples. Les tentatives occidentales d’opposer la liberté individuelle à la sécurité collective ont échoué. En Asie occidentale, les différences ethniques, religieuses et sectaires sont considérées comme une source de richesse et non de division.

L’expansion de l’OTAN vers l’est, en particulier dans le nord de la mer Noire, constitue une menace pour tous les peuples de la région. Il y a un alarmisme problématique alimenté par les puissances européennes, et nous appelons les peuples d’Europe à résister aux politiques bellicistes promues par Berlin, Paris et Londres. La résistance de la Russie, en ce sens, et d’autres acteurs régionaux, est fondamentale pour préserver notre avenir commun. Le contrôle des bases de l’OTAN et des États-Unis dans la région est une responsabilité partagée. Ces présences menacent la paix, le développement et la stabilité de la mer Noire à l’Anatolie orientale. L’élimination de ces bases est un devoir envers nos peuples et envers l’humanité. Les exercices militaires conjoints des États-Unis, d’Israël et de leurs alliés en Méditerranée orientale, sous des noms tels que Noble Dina et Nemesis, constituent une menace directe pour la souveraineté maritime régionale.

Une OTAN qui s’élargit est une OTAN qui se détruit elle-même.

En réponse aux tentatives occidentales de fragmenter le Caucase, un front uni et solidaire est nécessaire. Ankara le sait bien. L’adhésion de l’Azerbaïdjan, de la Géorgie et de l’Arménie à l’OTAN augmenterait l’instabilité dans la région, menaçant l’équilibre dans l’ensemble de la mer Noire et des bassins méditerranéens. La Turquie doit exercer son droit de veto sur tout développement de ce type.

La proposition d’une alliance stratégique entre les États de la région et les puissances émergentes telles que la Chine et la Russie est d’un grand intérêt. La présence conjointe turco-russe en Syrie est un facteur de stabilisation. Le renforcement de la coopération militaire avec la Chine est essentiel pour garantir l’autonomie stratégique et la sécurité des routes commerciales.

L’agression menée par les États-Unis et Israël depuis 1991, qui a dévasté l’Irak et la Syrie, menacé l’Iran et la Turquie et fomenté des organisations extrémistes pour déstabiliser la région, est également fermement condamnée. L’objectif, en partie, est d’imposer une entité kurde artificielle en tant que « deuxième État israélien ». Le récent succès de l’Iran dans la lutte contre les relations israélo-américaines est un signal important pour l’équilibre de la Méditerranée et de la mer Noire. Nous défendons également le droit de l’Iran à un programme nucléaire civil et l’unité territoriale de la Syrie.

En Libye aussi, la Turquie adopte une position de médiation : l’ingérence occidentale doit cesser, restaurer la souveraineté territoriale et laisser le gouvernement libre d’agir, en arrêtant l’expulsion des migrants.

Mettre fin aux sanctions, aux embargos et aux mesures coercitives imposés à l’Iran, à la Russie, à la Syrie, à la Turquie, à la RTCN, à l’Abkhazie, à la Chine, à la Corée du Nord, au Venezuela et à Cuba est une priorité, et la Turquie est consciente que l’adhésion à l’initiative Belt and Road est une occasion à ne pas manquer.

La question palestinienne occupe une place très particulière. La majorité des Turcs condamnent l’occupation, tout comme les forces politiques, appelant à des négociations de paix et rejetant les accords d’Abraham imposés à la Syrie. La cause palestinienne est aussi une cause turque, car la fraternité islamique transcende les opportunités politiques. Le système occidental mondialiste génère des crises humanitaires, sociales et environnementales. Sa culture, marquée par la décadence morale et l’atomisation sociale, est en déclin. En réponse, une nouvelle civilisation est en train d’émerger qui valorise la souveraineté, la solidarité et la justice sociale.

La domination unilatérale des États-Unis est terminée. La multipolarité est aujourd’hui une réalité concrète. Nous saluons les efforts déployés par les pays du Sud et les organisations régionales, des BRICS à l’ASEAN, de l’OCS à la Ligue arabe, pour construire un nouvel ordre mondial indépendant de la surveillance occidentale.

Les eaux de la mer Noire et de la Méditerranée portent en elles la promesse d’un avenir commun.

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