Contre les vents mauvais.

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Cueilli samedi dernier une petite bolée de framboises remontantes pour agrémenter mon yaourt quotidien. Et coupé l’ultime fleur d’un glaïeul qui a eu l’idée saugrenue de s’épanouir au milieu de l’automne.

Les experts du GIEC nous le répètent pourtant à l’envi : le temps de jadis n’est plus ce qu’il était à cause du réchauffement climatique. C’est si vrai qu’à la mi-novembre, les consommateurs des cafés des Xème et XIème arrondissements de Paris se croyaient à Séville et jabotaient gentiment en terrasse de cinéma, de théâtre et peut-être même aussi de philosophie. Les illuminés envoyés par Daech pour punir les "jouisseurs", comme ils disent, de notre société hédoniste auraient-ils fait moins de victimes si le ciel avait été brumeux, le vent de traverse aiguisé et la bruine glaçante ?

Rien n’est moins sûr tant leur détermination suicidaire était résolue. Mais le fait est que les préoccupations de ceux que l’on appelle parfois avec un peu de légèreté nos dirigeants et les commentaires des inénarrables experts en tout qui accaparent les médias étaient jusqu’alors presque entièrement dévoués à la fumeuse vingt et unième "Conference of Parties", comme on dit si joliment en français.

Les esprits sont aujourd’hui plus hantés par les terribles images des attentats étalées par les télévisions et les journaux que par celles des ours blancs de l’arctique errant à la recherche de leur banquise disparue, l’extinction des syncaris pasadenas suite à l’érosion des côtes provoquée par la montée des eaux et la fureur des marées du siècle et les destructions de paysages millénaires par les ouragans, tornades et autres inondations toujours plus fréquents et déchaînés. Ce qui n’empêche pas par ailleurs les déserts de progresser et d’engloutir dans leurs sables pâturages et troupeaux, des fleuves et des lacs de s’assécher au désespoir d’innombrables villages de pécheurs désorientés, des rivières de se tarir ou de charrier tant d’immondices et de produits industriels toxiques qu’elles corrompent des terres autrefois fertiles.

Les forêts tropicales succombent face à l’avancée inexorable de cultures inadaptées pratiquées dans le seul objectif d’un profit immédiat. Les mers ne sont plus seulement sillonnées par des navires de plus en plus grands et de plus en plus rapides mais aussi par des tonnes et des tonnes de déchets toujours plus empoisonnés de nos sociétés du gaspillage. Et ce sont des modes de vies ancestraux qui se délitent et qui meurent abandonnant des populations désemparées et perdues. Et ce sont des millions d’hommes, de femmes et d’enfants qui sont chassés sur les routes à la poursuite d’une survie qu’on leur refuse trop souvent.

La chanson de Francis Cabrel décrit bien leur condition, « Chacun chez soi, moi je veux bien sauf que chez moi, y a rien ! » Défendre le droit de boire en paix une bière à la terrasse d’une brasserie, d’aller au spectacle ou de danser jusqu’au petit matin pour oublier les mille tracas de la vie quotidienne est tout à fait légitime. C’est une des formes de la liberté. Résister à la sauvagerie des fous de quelque doctrine que ce soit qui veulent imposer leurs préceptes et leurs règles par la violence et la barbarie, est évident. Cultiver des valeurs de tolérance et de solidarité et les vivre au jour le jour est bien aussi. Et lutter contre la dévastation par insouciance, égoïsme ou indifférence d’une Terre qui nous héberge et d’une nature dont nous faisons partie relève du même combat.

Car c’est sans doute la meilleure manière de ne pas se laisser emporter par les vents mauvais qui rodent toujours au fond du cœur de l’homme. Et les chemins du futur étant imprévisibles, qui peut dire vers quels horizons ils nous conduiraient ? Voilà qui laisse encore bien des choses à penser.

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