Le cabinet de guerre de l’UE se réunit au nom de qui ?

Si vous voulez la paix, préparez la paix

Contrairement au gouvernement britannique ou à l’administration américaine, les dirigeants européens semblent avoir perdu leur lucidité. Une fureur aveugle se dégage convulsivement des documents et des déclarations faites ces dernières heures.

« C’est une bonne chose que les Russes remettent en question nos intentions car ils ont peur d’une confrontation avec l’OTAN », a déclaré la Première ministre estonienne Kaja Kallas, dans une interview à Sole24ore publiée mercredi, en référence à la possibilité de mettre les pieds sur terre en Ukraine, en discussion depuis fin février.

Pour elle, ce qui est en jeu, ce n’est « pas seulement l’architecture de sécurité européenne, mais l’architecture mondiale ». Le risque d’une troisième guerre mondiale est secondaire : « Si la Russie perd, nous n’avons pas à nous inquiéter. »

Ses paroles sont un appel à la guerre. Ils n’appartiennent pas aux codes diplomatiques auxquels les plus hautes autorités d’un État devraient adhérer, ils ressemblent plutôt aux élucubrations d’un extrémiste envahissant. Si Kallas peut se permettre ces provocations contre la Fédération de Russie, c’est parce qu’elle a l’OTAN derrière elle. Cela signifie qu’elle n’hésite pas à entraîner 33 autres pays dans la guerre, pour de telles démonstrations musclées.

On peut se demander comment la sécurité d’un pays comme l’Estonie peut compromettre non seulement la sécurité de l’Italie, mais même la sécurité mondiale. On peut se demander pourquoi, en supposant que Moscou ait vraiment l’intention d’attaquer les pays baltes, devrions-nous mourir pour Tallinn, pour l’imprudence ou la volonté de puissance du jeune dirigeant ? On se demande pourquoi l’Italie devrait s’inquiéter de la paix en Estonie, alors que les vents violents de la guerre soufflent devant nous, de l’autre côté de la Méditerranée, et qu’un génocide est actuellement en cours contre nos frères palestiniens ?

Nos racines, notre culture, notre cœur et notre âme sont méditerranéens et nous devrions penser à construire des ponts de paix et d’humanité entre ces deux rives. Cela devrait être le principal intérêt géopolitique de l’Italie, et non pas envoyer des armes pour déstabiliser le Moyen-Orient et jouer les fanfares d’une guerre qui ne nous concerne pas.

Notre avenir n’est plus ce qu’il était. Nous sommes face à un changement de paradigme, imposé aux peuples d’Europe en agitant l’épouvantail du perfide dictateur Poutine. L’Europe a choisi d’investir dans la guerre, de sacrifier le bien-être de ses peuples, afin de s’imposer sur l’échiquier mondial en tant que puissance militaire.

A la veille du Conseil européen de Bruxelles, le président Charles Michel publie un document dans lequel il en esquisse les grandes lignes : réarmement, économie de guerre, mobilisation des peuples.

« La Russie représente une menace militaire sérieuse pour notre continent européen et pour la sécurité mondiale. Si la réponse de l’UE n’est pas adéquate et si nous ne fournissons pas à l’Ukraine un soutien suffisant pour arrêter la Russie, nous serons les prochains. Nous devons donc être prêts à nous défendre et à passer en mode « économie de guerre ». Le temps est venu de prendre la responsabilité de notre propre sécurité. Nous ne pouvons plus compter sur les autres ni être à la merci des cycles électoraux aux États-Unis ou ailleurs. »

Le changement de régime nécessitera également un changement culturel :

« Aujourd’hui, nous sommes confrontés au plus grand défi de sécurité depuis la Seconde Guerre mondiale, nous devons donc renforcer notre état de préparation en matière de défense. Pour ce faire, il sera nécessaire que notre réflexion opère une transition radicale et irréversible vers un état d’esprit axé sur la sécurité stratégique. »

Il va sans dire que le changement de mentalité des gouvernements déterminera une transformation culturelle « radicale et irréversible », qui se reflétera dans les médias et dans l’éducation : pour faire la guerre, il faudra former les nouvelles générations à la culture de la guerre, dès l’enfance. Et c’est là que le projet de militarisation de l’école en cours depuis des années est clair, dénoncé par des journalistes comme Antonio Mazzeo et des intellectuels comme Angelo D’Orsi.

La ligne extrémiste ne fait pas l’unanimité. Le chef de la diplomatie européenne, Joseph Borrelle, met un frein à la course des eurocrates vers la Troisième Guerre mondiale.

« L’appel lancé aux Européens pour qu’ils prennent conscience des défis auxquels nous sommes confrontés est positif, mais nous ne devons pas non plus en faire trop. La guerre n’est pas imminente » même s’il faut « préparer l’avenir et augmenter nos capacités de défense », a-t-il déclaré à Bruxelles, en réponse à Michel.

L’inquiétude de Josep Borrell est palpable :

« Il ne s’agit pas de mourir pour le Donbass », ajoute-t-il, « il s’agit de soutenir les Ukrainiens pour qu’ils ne soient pas tués dans le Donbass ».

Le haut-commissaire, ainsi que le gouvernement italien, ont peut-être compris le point de non-retour vers lequel lui et ses collègues nous ont entraînés, et ils essaient de fixer des limites. Le résultat est pathétique, y compris à la lumière de la persécution subie par ceux qui, en Espagne, en Italie et dans d’autres pays, ont toujours mis en garde contre le risque que courait l’Europe, transformant un conflit local en un affrontement entre blocs géopolitiques. Aucun espoir de paix, aucune solution politique crédible ne peut venir de ceux qui ont armé la guerre pendant dix ans et continuent à respirer la haine et la mort parmi les peuples post-soviétiques (pour les intérêts des États-Unis et de Londres).

Face à l’incapacité de plus en plus déprimante de la gauche à parler aux masses et à indiquer une ligne politique, le pape François s’impose comme un point de référence pour tous ceux qui prônent la paix, même parmi les secteurs les plus orthodoxes de la micro-galaxie communiste fragmentée.

Son appel à la prudence aux dirigeants politiques, son appel constant à la paix, aux négociations, au courage du drapeau blanc pour faire prévaloir les intérêts des peuples sur ceux des usines d’armement, sont un éclair de rationalité dans le crépuscule de cette folie belliqueuse. La force de ses mots déconstruit la propagande de guerre et nous demande de nous mettre à la place des Ukrainiens. Ces Ukrainiens qui fuient leur pays, qui préfèrent risquer leur vie à Tisza plutôt que de mourir au front, qui sont kidnappés dans la rue par des commissaires militaires et battus dans les centres de recrutement. Ces Ukrainiens qui ne sont pas mentionnés dans la presse libre, qui subissent la sentence du silence tout comme leurs frères du Donbass.

Pour les avoir mentionnés, même le pape a été submergé par le pilori des médias. Cela donne une idée de la façon dont la restriction de la liberté d’expression ira de pair avec la militarisation de la société et de la presse. Les propos de Michel sont troublants :

« Nous devons être capables de parler non seulement le langage de la diplomatie, mais aussi le langage du pouvoir. »

Pas plus tard qu’hier, jeudi 21 mars, trois militants d’Antudo, une organisation politique indépendantiste sicilienne de gauche, ont été arrêtés pour avoir publié une vidéo d’une manifestation contre Leonardo SPA. Ils sont accusés de terrorisme et l’un d’eux a été condamné à une peine de prison.

Si c’est la tolérance que les gouvernements européens entendent réserver à ceux qui se mobilisent contre la guerre, alors le glas a sonné.

« Si nous voulons la paix, nous devons nous préparer à la guerre », mais la séquence historique des événements montre l’irrationalité de la déclaration de Michel pour conclure son document. Nos dirigeants européens ont perdu leur lucidité, ils préparent une guerre contre la Russie depuis des années, et ce processus ne peut nous conduire qu’à une chose : une guerre contre la Russie, qui sera également menée avec des armes nucléaires.

La guerre n’est pas jolie, la guerre est horrible : ceux qui ont des doutes peuvent aller sur Telegram et regarder les milliers de chaînes qui rapportent des images de ce qui se passe en Ukraine et à Gaza. Si vous avez des doutes, essayez de vous mettre à la place de ces soldats qui avancent sur le champ de bataille, de ces enfants mutilés, de ces mères et de ces pères qui pleurent sur les corps de leurs enfants. Ceux qui parlent de nous préparer à la guerre veulent ce sort pour les peuples d’Europe. Ceux qui veulent la paix essaient de dialoguer avec l’ennemi. Ceux qui veulent la paix rejettent toute tentative de déshumanisation. Ceux qui veulent la paix répudient les armes. Celui qui veut la paix prépare la paix.

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