Le manifeste jaune !

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Symboliquement, le jaune n’a jamais été une couleur sympathique. Elle est connotée au social traitre briseur de grève, genre cfdt négociant le poids des chaînes, au cocu qui se voit offrir des cravates jaunes citron par sa femme, au rire jaune compassé, à l’étoile jaune de sinistre mémoire, et ce n’est pas forcément en bougeant avec la poste qu’on risque de faire tendance et furieusement start up nation.

Bref, le jaune porte les codes de la honte et le maillot jaune frelaté d’un Amstrong par exemple, ne sauvera pas cette couleur de l’infamie.

Le jaune et même le petit n’a pas bonne réputation.

Loin du noir de l’anarchie, du blanc de l’innocence, de l’immaculée ou de la neutralité, du rouge de la révolution et du sang, du bleu royal ou républicain, du vert de l’espérance, le jaune politiquement n’est associé qu’au renégat, à la traitrise, au félon, au Judas.

Carton jaune.

Alors en faire soudainement une couleur révolutionnaire ça n’était pas gagné d’avance. Je ne sais pas qui a eu cette idée bizarre d’associer cette chasuble, moche accessoire obligatoire de sécurité, que si tu l’as pas dans ta bagnole t’as une amende et que si maintenant tu l’as, tu vas direct en garde à vue, mais il ne devait sans doute pas s’attendre à déclencher des marées fluos sur les Champs Elysées ni à en faire internationalement l’emblème de l’insurrection contre le nouvel ordre mondial.

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L’histoire a de ces facéties.

C’est donc ce gilet jaune dont personne ne voulait, objet de toutes les contraintes autoroutières qui fétichise les luttes d’aujourd’hui et c’est donc Jojo le gilet jaune déboulant en Bourgeoisie, ce rustre, ce manant, ce gueux, ce pouilleux qui finit par faire tomber les masques des bien assis bien pomponnés découvrant leurs faces hideuses de poudrés suffisants, de rebelles de pacotilles, d’artistes confortables, de journalistes de chambre, de politiques de gauche sans gluten qui aiment les révolutions partout en théorie oui mais surtout pas dans leurs chaussettes.

Faudrait voir à pas trop déranger cette société pseudo rebelle de notables paillassons.

Non ce n’était pas gagné d’avance, d’autant que le jaune fluo en ces heures sombres de charcutage gouvernemental, de boucherie policière joue même contre l’insurgé, le visibilisant comme jamais, l’identifiant dans le viseur, le désignant comme cible et dans le collimateur de cette violence « légale » de tous les abus de pouvoir, avec cette volonté féroce de martyriser les chairs, de punir, de casser, de faire mal, de ramener l'homo domesticus à son rang de domestique.

Tant que si nous naissions borgnes, finirions nous tous aveugles mais toujours moins que ceux qui ferment ou détournent les yeux ou recomptent en sordides comptables, le nombre de doigts arrachés comme la responsabilité navrante des mutilés qui l’ont bien cherché.

Mais paradoxalement c’est aussi cette extrême visibilité des invisibles ordinaires qui fait aussi sa force en tant que Jojo le gilet jaune s’assume, se reconnait, et que sans dents, descendant de sans culotte, se retrouve habillé pour l’hiver. (Et sans doute le printemps).

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C’est donc dans cette société étrange, libéralement décomplexée, qui légifère contre la fessée sociétale et se perpétue par l’éborgnement social, qu’il va nous falloir repenser le jaune, le reconsidérer solaire, tel qu’il fut en cet hiver de lacrymo et de ronds points.

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Oui Jojo le Gilet Jaune a montré qu’avec deux poings on faisait reculer la milice, qu’avec un tractopelle on faisait trembler le château et que c’est le premier qui faisait dans son froc qui se retrouvait marron, comme ces pathétiques listes européennes de faux gilets mais de vrais jaunes pour le coup.

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L’hiver fut jaune, le printemps pourrait être coloré, comme le manifeste lumineux

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de Vasarely.

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