Kabylie

Aujourd’hui, les Algériens ont une conscience renforcée de leur appartenance à une même communauté nationale. Sinon, on ne s’expliquerait pas qu’ils manifestent pendant de longs mois pour revendiquer un changement de la nature de l’État. Aujourd’hui, après deux décennies de grande douleur, le terrorisme n’a plus de beaux jours devant lui. Et pourtant, aujourd’hui, les accusations « d’atteintes à l’unité nationale » ou d’appartenance à « une organisation terroriste » sont distribuées à tout-va.

Cela rappelle les années 1950-54, aux États-Unis. Dans cet immense pays où se trouve le plus faible parti communiste de la planète, le sénateur McCarthy a réussi à entraîner l’Administration et une partie de l’opinion américaine dans une « chasse aux sorcières ». La cible, les communistes implantés dans des cercles marginaux d’intellectuels. C’était une instrumentalisation de la guerre froide.

Ces temps-ci, le tapage médiatique fait autour du MAK présente quelques similitudes. Pour tous ceux qui sont familiers de la Région kabyle, le poids politique du MAK est surévalué. Son audience dans la société civile kabyle profite plutôt des amalgames. Sauf à de rares occasions, il n’a pas de manifestations propres. Il présente les caractéristiques des minorités agissantes.

Une visibilité amplifiée qui résulte en fait de la paralysie des grands courants qui animent habituellement la vie politique kabyle. Depuis que le MAK s’est transformé en mouvement séparatiste, il s’est placé dans une posture de rupture radicale avec l’État central. Les partis, les hommes politiques et les universitaires traditionnellement opposants au régime sont devenus « le ventre mou » de la Kabylie.

Tous les efforts qu’ils font pour promouvoir des « ruptures avec l’armée et l’islamisme », dénoncer une politique « d’apartheid » et « une opération zéro kabyle » paraissent abstraits et défensifs. Le séparatisme du MAK a placé la barre très haut. Il paraît occuper une position offensive même si cette organisation n’a pas les moyens de l’assumer réellement.

Mais il a l’avantage d’être clair, profitant des défaillances des autres acteurs de la Région. S’inscrivant dans le seul registre de la contestation de l’État central, les autres opposants qui se réclament de la démocratie n’offrent pas de perspectives dans le cadre de l’Algérie unitaire. Leur opposition au séparatisme devrait se traduire par l’adhésion à un projet rénové plus visible de l’Algérie unitaire. Une rénovation qui intègre la régionalisation et les libertés individuelles et collectives.

Une rénovation qui s’applique à toutes les régions du pays. Tous les Algériens se réjouiront du rôle pilote que jouerait la Kabylie dans cette perspective qui doit entraîner le pays tout entier. N’a-t-elle pas joué ce rôle dans le cadre de la Wilaya 3 historique pour l’indépendance de l’Algérie ? Cet état d’esprit était présent dans le Hirak de Kabylie. En effet, le « Hirak kabyle », outrepassant les partis et leaders traditionnels de la Région en perte de vitesse, s’est inscrit dans la revendication de la rénovation de l’État unitaire et donc de son appartenance pleine et entière à l’Algérie.

La présence des militants du MAK ne s’est traduite par aucun mot d’ordre séparatiste. On peut dire que le MAK a pris acte du rapport de force réel au sein de la société civile kabyle. C’est un constat que ne semble pas partager le pouvoir. Bien au contraire, il a procédé à une médiatisation démesurée de cette organisation, l’inscrivant dans la perception d’un complot tramé de l’extérieur.

Une telle opération sert de justification à la répression de cette organisation qualifiée de « terroriste » sans que des éléments convaincants soient présentés à l’opinion publique. La répression ne vise pas seulement cette organisation. Elle a même été étendue à des personnalités de la Région qui proposent un statut de la Kabylie dans le cadre de l’État unitaire. Cet amalgame trahit une priorité sectaire : réduire le foyer d’opposition au pouvoir. Quitte à heurter les sentiments unitaires de la population de Kabylie.

Les Régions du pays qui ont exprimé leur solidarité après les incendies sans précédent qui ont endeuillé la Kabylie ont heureusement conforté les sentiments patriotiques de la population de Kabylie. Mais l’État central persiste dans la surévaluation du mouvement séparatiste au détriment du puissant potentiel unitaire de la population de Kabylie.

Il possède pourtant un levier qui pourrait apporter apaisement et dialogue : La libération de tous les détenus poursuivis à travers tout le territoire national pour l’expression pacifique de leur opinion.

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