Pourquoi “Patchwork” ?

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On m’a demandé le sens de la ré-édition en livre de textes parus séparément, à travers une longue période. Je réponds en partie à cette question dans l’introduction de Patchwork :

« Le retour sur ces textes a plusieurs objectifs, plusieurs sens dont je voudrais ne parler que de ceux qui me concernent directement : d’abord, laisser un témoignage sur ce que, en écrivant, j’étais à cette époque : un militant enfermé malgré lui dans une problématique hasardeuse, un penseur qui essayait de voir sa société avec un certain recul, un critique qui tentait de découvrir ce qui se cachait derrière les apparences, de battre en brèche les vérités établies, les dogmes irréfutables, un observateur de son temps dont il témoignait, non sans une certaine tendance didactique dont il se défendait.

En définitive, la re-lecture de ces textes m’a persuadé que, s’ils contenaient des erreurs ou des insuffisances, c’était dû davantage à l’insuffisance ou l’inadaptation de leurs outils d’analyse ou au manque d’une clarté que les événements futurs révèleraient, que d’une obstination dans un raisonnement fermé.

En d’autres termes, il m’apparaît que, dans les analyses faites ici, a toujours été possible une évolution, un approfondissement… Derrière les diverses affirmations, il me semble que le propos justifiait la phrase de Marx, « Nous ne nous présentons pas au monde en doctrinaires avec un principe nouveau : voici la vérité, à genoux devant elle ! Nous apportons au monde les principes que le monde a lui même développés dans son sein. »

Puisse le lecteur partager l’envie de faire un bout de chemin avec moi et, en allant d’un sujet à l’autre, éprouver le désir de poursuivre cette incessante quête vers la vérité, les vérités devrais-je dire, que nous n’atteindrons toujours que partiellement, et en sachant que c’est dans cette marche que se situe aussi la liberté humaine. »

Il faudrait ajouter ici une autre préoccupation, qui est de plus en plus pressante depuis que, après la chute du mur de Berlin en 1990, et celle, concomitante, des régimes « communistes » de nombre de pays de l’Est : la réflexion à gauche semble avoir disparu au profit de prises de position immédiates, en réponse à l’actualité, non en rapport avec une analyse de fond, mais sous forme de réaction conformes à un non-dit qui serait un socle de valeurs de gauche, tenant plus de la morale que de l’analyse politique ou sociale.

Que ce type de réactions soit légitime et nécessaire, cela va de soi. Mais, outre que cette attitude semble relever de ce que j’ai appelé « danser sur une musique d’autres », elle laisse ses auteurs incapable de définir une ligne de conduite cohérente à laquelle rester attachés ; semblables à des navigateurs perdus en mer, ils n’ont plus de boussole pour s’orienter, pour déterminer la direction de la terre. C’est d’autant plus frappant en ces veilles d’élections où tout le monde semble perdu, ne sachant ni pourquoi voter, ni pour qui, n’attendant rien de ce remue ménage.

Mon espoir est de participer à réhabiliter pour mes lecteurs l’effort pour comprendre les faits au-delà de leur causalité immédiate, et de goûter la satisfaction que produit à chaque fois cet effort et les discussions sur des problèmes de fond. Réfléchissons, les choses sont souvent autres que ce qu’elles paraissent, essayons d’y voir plus, de voir mieux…

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