Courants croisés occidentaux : populisme culturel contre architecture profonde

Quand l’équilibre fondamental d’un « ordre » se brise au-delà d’un certain point ; quand les jeunes se révoltent contre l’illusion et commencent à chercher quelque chose de nouveau pour remplacer les vieux schémas épuisés… C’est ce qu’on appelle l’attente de la nouvelle lune.

Les élections de mi-mandat de 2026 aux États-Unis ont commencé cette semaine avec trois scrutins majeurs et une autre élection importante en Californie concernant la redéfinition des circonscriptions. Les démocrates ont remporté une victoire écrasante dans trois États clés (New York, New Jersey et Virginie), ainsi que sur la proposition de redécoupage en Californie, ce qui pourrait leur garantir cinq sièges supplémentaires à la Chambre des représentants.

Mais la meilleure grille de lecture de ces événements est peut-être celle des dernières élections générales britanniques : le parti au pouvoir était discrédité et très impopulaire. L’électorat voulait lui infliger une gifle retentissante, et il l’a fait. Le problème : les électeurs n’appréciaient guère les partis alternatifs. Pour envoyer le message, il fallait voter pour « quelque chose ». Le Parti travailliste a obtenu une majorité écrasante, mais sans véritable mandat. Le Premier ministre Starmer et son parti restent aussi impopulaires que les précédents. La politique britannique est en crise. La situation est similaire en France.

Ainsi, lorsque les journaux titrent que les démocrates ont « balayé » les élections américaines, cela reflète probablement la même double antipathie qu’en Europe. Les populistes américains rejettent l’establishment des deux partis, qu’ils considèrent comme « Pincopanco » et « Pancopinco » : leur réponse est « une peste sur les deux chambres ». Ce blocage n’a pas de solution rapide : la classe dirigeante est solidement enracinée et contrôlée par les grands donateurs pour maintenir le statu quo.

Une dynamique populiste inévitable

Elle pourrait bientôt dépasser les structures de répression de la liberté d’expression imposées par les donateurs. Les raisons de ce blocage sont structurelles autant qu’idéologiques. Sur le plan économique, la crise touche toutes les familles sauf les 10 % les plus riches. Le marché boursier américain est entré dans une phase d’euphorie irréelle : les fondamentaux ne comptent plus, seuls importent les « mèmes » du jour. (Les 10 % les plus riches détiennent 87 % des actions.) Pendant ce temps, les ménages modestes sont frappés par l’inflation, provoquant une crise de confiance sans précédent : même les produits de première nécessité restent invendus.

La “croix de la mort” et la bombe sociale

Un graphique résume l’angoisse des élites financières : la courbe des actions grimpe en flèche tandis que celle des offres d’emploi plonge. Ce point de croisement coïncide avec le lancement de ChatGPT. Ce signal est interprété comme une bombe à retardement sociale : les grandes entreprises anticipent-elles une substitution massive des emplois par l’IA ? Pourtant, une étude du MIT révèle que 95 % des entreprises ayant investi dans l’IA n’ont obtenu aucun rendement : l’IA actuelle ne « comprend » pas les environnements, elle ne fait qu’identifier des motifs.

Malgré cela, les géants américains prévoient d’investir 420 milliards $ dans l’infrastructure IA l’an prochain. Geoffrey Hinton, « parrain de l’IA », affirme que ce niveau de dépenses ne se justifie que par le remplacement du travail humain : « Pour gagner de l’argent, il faudra remplacer l’homme. »

Trump, l’IA et la fracture économique

Trump mise sur la domination américaine en IA : « Nous construisons les plus grands bâtiments jamais vus : les bâtiments de l’intelligence artificielle. » Mais Nvidia prévient que la Chine pourrait dépasser les États-Unis. Derrière cette course se cache une faille géologique : deux économies distinctes coexistent en Occident — une cornucopie financiarisée et une économie de privation. Elles ne se rencontrent pas. Changer ce modèle exigerait de bouleverser l’architecture profonde du système.

Conséquences politiques

Si Trump échoue à se redéfinir après ce signal des urnes, il risque enquêtes et impeachment dans un contexte de crise politique et économique. Ses options sont limitées : il ne pourra revenir sur l’architecture de politique étrangère financée par les donateurs depuis 40 ans (soutien inconditionnel à Israël, recours à la force militaire, primauté du dollar). Même l’IA, perçue par le MAGA comme « orwellienne », ne suffira pas à inverser la tendance.

La clé pour l’avenir, aux États-Unis comme en Europe, sera de convaincre les électeurs qu’on peut résoudre les contradictions structurelles qui minent leur bien-être. Si les solutions politiques échouent, l’insurrection devient possible.

Conclusion :

La politique étrangère de Trump se heurtera à des obstacles venant d’Israël (aggravant le malaise du MAGA) et d’Europe. Les élites européennes, engluées dans la « russophobie », espèrent encore prouver qu’elles avaient raison : que la Russie est la menace. Mais leurs électeurs n’y croient plus. L’ordre occidental est instable. Trump tente de ressusciter une « âge d’or » américain qui n’existe plus. Nous sommes dans l’attente de la nouvelle lune.

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