La Turquie, notre nouvel ennemi ?

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Longtemps avant la cinglante défaite de Paris sur l’échiquier libyen, l’opposition française quasi systématique à la Turquie remonte à l’arrivée au pouvoir de l’AKP et d’une équipe dirigeante qui, tout en respectant l’alliance militaire atlantique, a cessé de faire aux Européens certaines des concessions diplomatiques auxquelles leurs prédécesseurs les avaient habitués.

La France et l’Europe ont depuis lors multiplié les mauvaises manières à l’encontre d’Ankara et de son leader, faisant preuve d’une sorte d’hostilité “de principe”, étroitement alignée d’ailleurs sur celle de Tel-Aviv, à l’encontre du parti “islamiste” qui a porté R.T. Erdogan au pouvoir.

Les rebuffades sur l’adhésion à l’UE, initiées il est vrai par Giscard d’Estaing, furent ensuite théâtralisées par le président Sarkozy et n’ont jamais été contredites par ses successeurs. Est venu s’y ajouter, lors du coup d’Etat avorté d'août 2016, l’hypocrisie sinon la complicité de la France qui en était manifestement informée.

Paris dénonce ensuite très régulièrement des atteintes aux droits des opposants turcs qui restaient parfaitement ignorées, sinon encouragées, avant l’arrivée de l’AKP au pouvoir et que Paris minimise éhontément lorsque, autrement plus graves, elles sont au Caire le fait de son allié et client A. Sissi.

Puis est venu, pour combattre Daesh, le choix assumé des Occidentaux d’armer l’aile syrienne de ce PKK séparatiste kurde que la Turquie a quand même quelques raisons de combattre. L’incident maritime du 10 juin 2020, dont la version française a été spectaculairement désavouée par une majorité des membres de l’OTAN, a explicité cette malhonnêteté dont Paris fait montre de façon accrue depuis la débâcle de son champion Haftar.

Après l’épisode du retour de Sainte Sophie aux cinq siècles de sa trajectoire musulmane, la mauvaise foi passionnée de pans entiers de la classe dirigeante n’a fait que l’entériner. Last but not least est cet épisode dérisoire de la médiation tentée (le 25 juillet) par l’ex-“révolutionnaire” Bernard-Henri Lévy, dont, malheureusement pour lui et pour ses commanditaires, aucun des adeptes du GNA n’a oublié qu’il a soutenu sans réserve le parti-pris de Macron en faveur de la contre-révolution de Haftar.

Où cela conduit-il la diplomatie régionale de la France ? A plus d’efficacité économique, comme le pensent peut-être ceux qui la maintiennent dans le confort à très court terme du clientélisme des monarchies pétrolières ? Ou bien plutôt, face à l’irrésistible redistribution régionale des cartes, à une impasse dangereuse dont les termes, usant du lexique de la confrontation, sont jour après jour en train de se préciser ?

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