Que cela voudrait dire ?
Rappelons d'abord que dans une petite économie ouverte, l'inflation sous-jacente sert de point d'ancrage à la dynamique des prix, tant sur le marché que sur le plan réglementé. Par le biais des anticipations, des coûts et du taux de change, elle façonne la trajectoire à moyen terme de l'inflation globale, même lorsque des fluctuations à court terme résultent de chocs externes.
Signalons aussi qu’un consensus se dégage d’une littérature de haut niveau (Akerlof et Perry ; Woodford...), selon lequel l’inflation sous-jacente détermine la trajectoire à long terme de l’inflation globale, tandis que l’écart d’inflation reflète des désalignements temporaires souvent amplifiés dans les économies ouvertes par des chocs de prix importés.
Ici je voudrais m’intéresser à :
(1) La différence négligeable entre l’inflation globale (4.9%) et celle sous-jacente (5.1%), et
(2) cette légère baisse de 5 à 4.9, et de 5.2 à 5.1%, abstraction faite de l’erreur de calcul inévitable faite par l’INS ou par les meilleurs centres de prévision au monde (ça demande des développements techniques supplémentaires).
Lorsque l'écart entre l'inflation sous-jacente et l'inflation globale est quasi nul, l'économie évolue dans un environnement relativement stable, où les chocs temporaires sont atténués et les anticipations bien ancrées.
Dans ces conditions, une légère baisse parallèle de l'inflation globale et de l'inflation sous-jacente reflète davantage des ajustements à court terme qu'une transformation structurelle profonde. La modération des prix résulterait ici de facteurs transitoires, tels que la baisse saisonnière des coûts d'importation, un ralentissement saisonnier de la demande ou une appréciation du taux de change, plutôt que d'une modification fondamentale de la dynamique de l'inflation intérieure.
Par conséquent, tant que :
(1) le gap entre les deux mesures d’inflation est négligeable, et
(2) ces deux mesures se situent à des niveaux assez élevés (la croissance du niveau général des prix l'emporte sur celle des salaires nominaux), si la tendance désinflationniste à court terme peut paraître rassurante, elle ne signale pas nécessairement une réduction durable des pressions inflationnistes. Elle indique simplement que des influences transitoires dominent momentanément un processus inflationniste par ailleurs stable.
Ainsi, lorsque l'écart d'inflation (Sous-jacente vs. Globale) est quasi nul, un léger repli de l'inflation sous-jacente et de l'inflation globale toujours à des niveaux élevés) ne doit pas être interprété comme la conséquence directe d'une politique monétaire. Il reflète généralement :
(1) Une stabilisation de l'environnement macroéconomique surtout extérieur pour les petites économies ouvertes, caractérisée par une moindre volatilité des prix de l'énergie et des importations, et
(2) un fléchissement temporaire de la demande intérieure (dépenses des ménages et publiques).
Dans ce contexte, les conditions monétaires peuvent déjà être neutres ou légèrement accommodantes, la désinflation observée résultant alors d'un relâchement naturel des pressions sur les coûts et la demande plutôt que d'un resserrement délibéré de la politique monétaire. Le signal est donc celui d'une modération conjoncturelle, et non celui d'une désinflation structurelle ou induite par des mesures politiques.
Nb: Si des données fines avaient été disponibles, l'interprétation aurait été plus précise.