Hocine Zahouane et Mohamed Harbi

Le court texte de Mohamed Harbi ci-dessous au sujet de son compagnon de lutte Hocine Zahouane m'a inspiré cette réflexion écrite à chaud.


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Hocine Zahouane et Mohamed Harbi ont incarné, entre 1962 et 1965, la gauche du FLN. Leur pensée était un mixte de nationalisme et de marxisme non léniniste. Ils se méfiaient de l'encadrement policier de la société, rejetant aussi le style autoritaire de construction de l'État par le haut.

Ils étaient attirés plutôt par le modèle autogestionnaire yougoslave. Ils connaissaient leur société qu'ils n’idéalisaient pas, mais ils estimaient que l'indépendance était susceptible de créer une dynamique révolutionnaire avec l'objectif de tirer l'Algérie du sous-développement économique et culturel.

Ils étaient conscients des pesanteurs de la société, et qui naturellement avaient des prolongements au sein des élites civiles et militaires du mouvement national. Ils ont été vaincus non pas par la droite du FLN, mais plutôt par la vision apolitique du politique dont le discours était populiste.

Ils avaient compris que le populisme est l'idéologie de celui qui parle au nom du peuple. Pour le colonel Boumediene, qui les avait mis en prison au lendemain du coup d'État de juin 1965, le peuple est une abstraction, comme si le peuple n'était pas un ensemble d'individus en chair et en os.

Dans ce sens, le populisme n'a aucune idée des droits de l'homme. Harbi raconte que, lors d'une réunion où il avait soulevé la question de la torture, Boumediene lui aurait dit: "donne-moi une autre méthode pour faire parler un opposant, et je n'utiliserais pas la torture". Le chef populiste torture des individus en chair et en os, qui font partie du peuple, pour défendre le peuple abstrait et mythique qui lui sert d'élément de langage dans ses discours lyriques.

Il n'est pas surprenant que Mohamed Harbi soit l'historien et le sociologue du populisme en Algérie qui a vidé le mouvement national de ses potentialités révolutionnaires, et que Hocine Zahouane ait été à la tête de la ligue algérienne des droits de l'homme. Ils avaient compris que nul ne peut prétendre servir le peuple s'il ne respecte pas la dignité et les droits de TOUS les individus qui composent le peuple, quelles que soient leurs opinions politiques et idéologiques.

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